Découvert à Arles lors d’une rencontre avec l’équipe de l’Association Petit à Petit – coopérer pour vivre ensemble, le programme Des étoiles et des femmes fait le pari de la cuisine pour accompagner vers la professionnalisation 12 femmes par an, habitantes des quartiers populaires, dans 14 villes de France Métropolitaine.
Sur une idée originale d’Alain Ducasse, Des Étoiles et des Femmes a été initié en septembre 2015 par La Table de Cana Marseille, l’association Festin et Marseille Solutions, à partir d’un triple constat (1) :
- Le fort taux de chômage des femmes dans les quartiers politique de la ville (QPV) : 50% des femmes de 15 à 64 ans se situent en dehors du marché du travail et ne sont ni en emploi, ni en formation, ni en recherche d’emploi.
- La sous-représentation des femmes dans la gastronomie : sur les 2650 chef·fes étoilé·es à travers le monde, seuls 5 % sont des femmes.
- Une pénurie de talents dans la restauration : 120 000 postes sont à pourvoir dans le secteur de la restauration selon un rapport du Conseil économique, social et environnemental datant de janvier 2022.
Une formation gratuite et diplômante
« Le dispositif permet d’accéder à un CAP de cuisine en 9 mois (ndlr : au lieu de 2 ans), qui sera en alternance entre le lycée hôtelier et des grands restaurants. Chaque promotion accueille 12 femmes par an » explique Madalena Guerra, Coordinatrice à Marseille & Animation-accompagnement du réseau.
Il s’adresse à des femmes éloignées de l’emploi, en reconversion et vivant dans un quartier politique de la Ville. Pôle Emploi (ndlr : désormais France Travail) assure le financement de la formation et d’autres partenariats nationaux et locaux permettent de prendre en charge l’ensemble des frais périphériques de la formation. Et c’est là l’essentiel et la spécificité du dispositif : chaque association qui porte Des étoiles et des femmes sur un territoire donné met en place un accompagnement socio-professionnel individualisé et renforcé en amont, puis tout au long de la formation, pour lever les freins périphériques au retour à l’emploi, notamment ceux liés à la garde d’enfants, à la mobilité et à l’appropriation des codes de l’entreprise. Issues de situations personnelles diverses, tout est mis en place pour accompagner chacune au plus près de ses besoins : cours de français, frais de garde, permis de conduire, frais de transport, apprentissage du vélo, coaching individuel et collectif…
Quel impact ?
Rapidement, le projet a pris de l’ampleur et s’est développé dans les villes de Bordeaux, Nice et en Ile de France. Puis, les villes de Arles, Montpellier, Strasbourg, Lyon, Lille, Toulouse et Bayonne ont rejoint l’aventure et l’ont déployée à partir de leur écosystème local spécifique. En 2023, une étude d’impact a été menée à l’échelle nationale par Koéris, un cabinet indépendant (2).
Sur le plan quantitatif, il en ressort trois données essentielles : le réseau Des étoiles et des femmes peut s’enorgueillir de compter 476 femmes formées, 98% de réussite au CAP cuisine et 70 % de retour à l’emploi des femmes dans les 6 mois suivant l’obtention de leur diplôme. Au-delà des statistiques, les femmes bénéficiaires gagnent en autonomie dans toutes les sphères de leurs vies : elles gagnent en confiance et estime de soi et développent leurs capacités à résoudre des problèmes, mobiliser leurs réseaux relationnels, trouver un meilleur équilibre vie professionnelle / vie personnelle, définir et communiquer leur projet professionnel, rechercher un emploi… Le projet Des étoiles et des femmes transforme les femmes accompagnées. Mais il transforme les étoiles aussi ! Charlotte Baldaquin, ex-danseuse de ballet reconvertie en cuisine et actuellement cheffe aux Grandes Tables de la Criée à Marseille, en témoigne : « Je suis très fidèle à cette association qui fait grandir les femmes et qui nous fait grandir aussi en les accompagnant. » Quant à Eugénie Béziat, ex-cheffe étoilée de La Flibuste à Nice désormais cheffe de l’Espadon au Ritz Paris, elle n’a aucun doute sur le sens de son engagement : « Être une femme en cuisine c’est l’avenir. Il faut qu’elles reviennent les femmes en cuisine car ça a commencé comme ça il me semble, avec les mères lyonnaises. »
Sororité
Le recrutement de candidates restant le 1er défi, les alumni sont les 1ères ambassadrices du programme, à l’instar de Aminati Halidane, qui a obtenu son CAP cuisine en 2019 à Marseille : « J’ai été parler avec des femmes du centre social de mon quartier, à la Castellane. Au début, je leur dis que nous aussi on avait peur mais qu’une fois dedans, c’est trop beau ! ». Son parcours parle pour elle : Aminati est aujourd’hui cheffe du restaurant de la crèche associative de la Friche Belle de Mai. Grâce à son travail, le restaurant de la crèche a obtenu trois carottes, soit la plus haute distinction du label de restauration collective bio « En cuisine » délivré par Ecocert.
A quand l’implantation du programme Des étoiles et des femmes dans la région Pays de la Loire ?
Rédaction : Maud Raffray
(1) Sources : site internet du réseau national Des étoiles et des femmes
(2) Le rapport complet de mesure d’impact est disponible sur le site internet du réseau : https://www.desetoilesetdesfemmes.org/mesure-dimpact/
Pour aller plus loin :
Le réseau national : https://www.desetoilesetdesfemmes.org/
Le programme à Arles, porté par l’association Petit à Petit : https://www.assopetitapetit.org/des-etoiles-et-des-femmes/