Depuis deux ans, les chorales féministes et militantes se multiplient à Nantes et dans sa région. Portées par l’envie de collectif, ces formations ont des modes d’organisation variés et une même conviction : le chant comme outil politique autant qu’espace d’émancipation. Petit tour d’horizon non exhaustif.

Les Dissonant·es, chorale nantaise née il y a près de deux ans, fait un clin d’œil à la localisation bien sûr et à la dissonance du chant qui “traduit le souhait de ne pas nous prendre trop au sérieux, en incarnant la version autogérée d’une chorale militante”. Mixte et dans une volonté d’inclusivité, le collectif fonctionne sans chef·fe de chœur : “On apprend collectivement à transmettre des chants, à travailler la polyphonie, à s’organiser”. Son répertoire tend à soutenir des luttes intersectionnelles contre les oppressions systémiques : féminisme antipatriarcal, écologie, antiracisme, lutte des classes, droits LGBTQIA+, anticolonialisme… Les répétitions du lundi soir au café associatif Les Impertinant·es affichent complet : la chorale n’accueille plus de nouvelles personnes pour le moment, mais fait plusieurs concerts dans l’année !

À Châteaubriant, depuis 2017, la trentaine de femmes de “la collective polyphonique féministe” Las Mariposas se retrouve deux fois par mois en mixité choisie. Las Mariposas, du nom des trois sœurs Mirabal qui ont lutté en République dominicaine contre la dictature de Trujillo jusqu’à leur assassinat le 25 1960 ; en 1999, l’ONU consacre le 25 novembre comme Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. “La symbolique du papillon nous invite à transformer consciemment nos vies.” Elles chantent les luttes, la joie, la colère, l’espoir, les peines des femmes du monde entier. “C’est une puissance sororale qui nous fait passer des larmes à l’envie de danser, de Jeanne Added à Anne Sylvestre, de chants en occitan ou en finnois.” 

Créée en 2018, la chorale nantaise Chants Rouges revendique la couleur qui symbolise “la passion, l’engagement, l’ardeur, les luttes, l’élan de vie, la puissance”. Mixte en théorie, mais composée uniquement de femmes, elle réunit 35 choristes autour d’un répertoire polyphonique large, chanté a cappella. Il est “engagé, vaste, universel, d’ici et d’ailleurs, d’aujourd’hui et d’hier et célèbre l’humanisme, le féminisme, l’écologie, la paix, l’hospitalité”. Les cinq chants préparés chaque année sont appris par cœur pour pouvoir “être en connexion avec le public qui est au centre, entouré par les choristes”. Les répétitions un mercredi sur deux à la Maison de quartier  de La Bottière à Nantes plus un samedi tous les deux mois produisent six à dix représentations annuelles, “portées par la joie”. 

Depuis deux ans, Voix Toutes Debout “crée du lien entre femmes”. Elle est la déclinaison chorale de l’association Femmes Toutes Debout, créée il y a cinq ans à Machecoul, dans le Pays de Retz.  Pas de prérequis pour venir chanter un samedi par mois des chansons engagées à la gloire des femmes. C’est “un lieu de ressourcement et de renforcement, où l’on prend un temps pour soi, mais ensemble”.  Les choristes, une vingtaine, viennent de différentes communes du Pays de Retz ; pour la plupart, l’exercice est nouveau. Le 8 mars dernier, “fierté d’avoir été à l’affiche du grand spectacle qui comptait Maylen Otondo”, danseuse de niveau international, basée à Saint-Mars-de-Coutais (17 km de Machecoul – NDLR).

Les Ré-enchanteuses, chorale intergénérationnelle de maximum 30 personnes, femmes et issues des minorités de genre, se réunit le lundi soir à la Manu, sans organisation par pupitre. Sororité, bienveillance et convivialité sont inscrites dans sa charte. Son code couleur : le violet (tiens donc ?). Son répertoire : des chansons écrites par des femmes actuelles et des chants de leur composition. Les paroles de “leurs chanson de l’année”, sur les stéréotypes de genre ou sur un hommage aux femmes, sont issues d’un atelier d’écriture collectif et mises en musique par Nanih, la cheffe de chœur. “Occuper l’espace public est important pour nous, par exemple dans le tramway, pour y soutenir et accompagner les femmes.” En mars 2025, la soirée des fameuses sur les joies des luttes féministes a été enflammée par les Ré-enchanteuses.

Qui a dit que la musique ne pouvait être autant un refuge, une arme douce qu’un formidable moteur de sororité ? La preuve par les chorales féministes. Pour qui veut s’engager autrement, donner de la voix pourrait bien être un premier pas.

Rédaction Florence Lesavre