À Nantes, Les Raymonde se démarquent par une mission audacieuse : faire de l’espace artistique un lieu où toutes les voix, notamment celles des femmes et des minorités de genre, peuvent s’exprimer sans contrainte. Né d’une volonté de favoriser l’empouvoirement, ce collectif devient tranquillement un acteur incontournable de la scène culturelle nantaise, en donnant la priorité aux talents encore trop souvent écartés du milieu artistique traditionnel. Nous avons rencontré Solange Maribe, co-présidente de l’association.
Un espace d’expression pour les femmes et minorités de genre
« Initiée notamment par les artistes, Hillary Brooke et Laurène Pierre-Magnani, Les Raymonde sont inspirées des girls camp états-uniens, et défendent un modèle de mixité choisie qui vise à laisser plus de place aux femmes et aux minorités de genre dans les jams » explique Solange. Cette démarche répond à un constat évident dans le milieu artistique : malgré l’évolution des mentalités, l’art reste dominé par les hommes cisgenres, ce qui limite la représentation des femmes et des minorités de genre. « Les Raymonde ont ainsi pris l’initiative de proposer un cadre alternatif, où chacun·e peut trouver sa place. Par exemple, c’est la première fois que j’ai vu des personnes handicapées monter sur scène, et autant de personnes queer, racisées… C’est ce qui s’est passé pour moi : je me suis sentie immédiatement à ma place », raconte celle qui est aussi la figure de proue de Majeur·es, le premier annuaire inclusif des professionnel·les femmes, personnes trans et non binaires de la musique.
Dans cette optique, ielles organisent des performances où l’inclusion et la bienveillance priment, « une autre manière de sensibiliser le public à cette réalité, en montrant qu’il existe une scène où les hiérarchies de genre sont abolies pour laisser place à la créativité de chacun·e ».

Une approche inclusive de la scène
Les Raymonde voient la scène nantaise comme un lieu inclusif où tous les récits, a fortiori ceux qui sont marginalisés, peuvent s’exprimer. L’association adopte une approche intersectionnelle, consciente que la question du genre croise souvent d’autres formes de discriminations, comme celles liées à l’origine, à l’orientation sexuelle ou à la classe sociale. Ce positionnement permet aux Raymonde de toucher un public diversifié, à leur image, tout en répondant aux attentes de personnes en quête d’un art plus représentatif et authentique. « Nous comptons aussi des technicien·nes parmi nos membres, ce qui nous permet, quand c’est possible, une autonomie sur la partie son et lumières, elles aussi en manque de diversité ».
Au-delà des performances qu’ielles organisent (jams et concerts), Les Raymonde s’investissent dans des discussions et des rencontres qui explorent les problématiques de genre dans le secteur culturel.
Une dynamique collective au service d’un projet plus grand
« Depuis sa création en 2020, l’association défend également l’idée d’abolir les frontières entre les professionnel·les et les amateurices, pour davantage de transmission, d’échanges et de possibilités : il s’agit de jouer d’un instrument et pas uniquement de chanter ! Montrer qu’on peut s’autoriser, en tant que femmes, à ne faire que jouer. Le chant fait partie de la jam, mais on y assigne spontanément les femmes, insiste notre interlocutrice. On peut aussi se permettre de s’affranchir de l’étape du chant pour se concentrer et prendre le temps d’apprendre un nouvel instrument, même quand on est déjà aguerri·e, rien que pour le plaisir de jouer ».
Un jeu qui a essaimé jusqu’au public, désormais rompu au concept et aux valeurs infusées par l’association. Avec le collectif Raymonde, Nantes – et Rennes, dans une moindre mesure – se dote d’un collectif innovant qui, loin de se limiter à l’art, mène un véritable combat sociétal pour l’égalité et la représentation.
Rédaction : Agathe Petit
Crédits photos : @Julia Briend pour la photo principale, @Raymonde pour la photo insérée dans l’article